S.F.X. N°198

Ce doit être désespérant de diriger un studio concurrent de Disney, de constater que la firme aux grandes oreilles accumule les mégahits à 1 milliard de dollars alors que vous-même rêvez d’en avoir un seul par an, qu’elle collectionne les sagas à succès quand votre propre studio n’en a qu’une ou deux. Et c’est encore plus vrai en 2019. Après deux années exceptionnelles, le studio est bien parti pour redéfinir le sens du mot « record ».

C’est bien simple, dans l’histoire du cinéma, aucun studio n’a jamais programmé autant de blockbusters dans un espace de temps aussi court. Ce qu’un studio concurrent étalerait sur deux ou trois ans, Disney le sort sur dix mois ! En 2019, ils vont proposer rien moins que la conclusion de deux des plus énormes sagas de l’histoire du cinéma, Avengers et Star Wars, ainsi que la suite des deux plus gros succès du cinéma d’animation, Toy Story 4 et La Reine des Neiges 2. Et pour faire bonne mesure, ils ont ajouté le remake en images « réelles » d’un des films d’animation les plus adorés qui soient, Le Roi Lion. Soit cinq mégahits garantis, avec des recettes pouvant dépasser les deux milliards de dollars pour les deux premiers. Disney pourrait approcher le record de la plus grosse recette annuelle d’un studio – en cinq films seulement…

N’importe quel concurrent serait ravi d’avoir un seul de ces blockbusters, Disney en a cinq… mais le plus impressionnant, c’est qu’ils ne constituent que la partie émergée de l’iceberg. Pour faire patienter le public entre les mégafilms, le studio a ajouté rien moins que Captain Marvel, Dumbo, Aladdin et Artemis Fowl. Soit quatre autres superproductions, juste pour boucher les trous entre les mégahits…

Neuf blockbusters en un an – la concurrence est lessivée ! Jamais Hollywood n’avait été témoin d’une domination aussi écrasante. L’année 2019 va être phagocytée par Disney à un point jamais vu. Et en 2020, ce sera encore plus extrême avec les films de la Fox intégrés dans le giron Disney. À ce moment-là, ce titan représentera à lui seul plus du tiers du box office ! Une hégémonie qui fait peur, tant elle implique de dérives, notamment en matière de pression sur les exploitants pour privilégier les films du groupe : avec un blockbuster par mois ou presque, Disney peut exiger le monopole des plus grandes salles de chaque complexe à longueur d’année. Quel multiplex oserait refuser et se priver d’un Star Wars, d’un Marvel ou d’un Reine des Neiges ? Un nouveau titan est né, et il est en train de redéfinir les règles du jeu. Pour le meilleur et pour le pire. 

Alain Bielik