S.F.X. N°170

Une fois encore, notre été cinéma promet d’être dominé par les superhéros. L’ascension irrésistible de ces personnages masqués ne lasse pas de fasciner. Ils constituent aujourd’hui les locomotives du film d’action, les piliers incontournables du box-office estival. On ne peut qu’être frappé par l’évolution qu’a subie le film d’action en l’espace de trente ans. Le genre a connu son apogée dans les années 80, avec l’avènement de héros à la fois drôles et impitoyables qui rendaient la violence « fun » à  l’écran. Dans les années 90, le genre a basculé dans la haute technologie avec l’explosion des effets numériques qui rendaient possible l’impossible. Dès lors a commencé une surenchère à laquelle on assiste encore aujourd’hui. Rapidement, les héros sont devenus de véritables surhommes auxquels on croyait de moins en moins. Une dérive qui a conduit logiquement à l’arrivée des superhéros à partir de 2000. La différence est frappante : dans les années 80, on allait voir le dernier Stallone, Schwarzenegger, Willis ou Gibson. C’étaient les acteurs qui portaient le film. À la limite, l’histoire importait peu, leur présence à l’écran constituait un label, une garantie. Aujourd’hui, avec les films de superhéros, c’est avant tout un personnage qu’on va voir. À part Robert Downey Jr., aucun interprète de superhéros n’est considéré comme une locomotive commerciale. Chris Hemsworth ? Andrew Garfield ? Chris Evans ? Personne ne va voir les films sur leur seul nom comme on le faisait pour Schwarzenegger. Aujourd’hui, seul Jason Statham peut s’en vanter, il est l’unique héritier de cette génération d’acteurs charismatiques, mais les entrées de ses films n’ont rien en commun avec celles des histoires de superhéros. Un signe des temps. Si l’esprit des années 80 survit au box-office, c’est uniquement de manière épisodique, avec un Jason Bourne original, un Expendables, ou bien sûr, l’increvable James Bond. Nostalgie, quand tu nous tiens…

Alain Bielik